top of page
  • Photo du rédacteurSirine Alkonost

Voix d'Iran - Téhéran, en direct de la rue



Il y a trois ans, ils pensaient aussi que ce serait "fini d'ici la fin de la semaine". Cela ne faisait que commencer.

On est mardi matin, et les rues de Téhéran sont inondées de policiers en uniformes couleur menthe à l'eau et aussi de cette autre sorte de guerriers de type samouraï ou robocop. Ils se tiennent debout et attendent, dans tous les endroits qu'ils peuvent trouver, pouvant contenir 15 ou 20 d'entre eux.
En 2009, ils ont compris, ou nous avons tous compris en fait, que la ville avait peu de recoins à offrir, pour ceux qui voudraient rester immobiles". Simplement "se rassembler" n'est pas pertinent. Tout est mouvement. À l'époque, ce n'était pas inhabituel, qu'un groupe de jeunes ou d'ouvriers du bâtiment traînent ensemble à un endroit donné. Sans raison particulière. Il y avait beaucoup de lieux disponibles pour cela et beaucoup de temps pour le faire. Mais maintenant, le temps qu'on a à perdre, c'est sur Instagram, et Twitter qu'on le dépense. Twitter est le nouveau "coin de la rue" . Mais les samouraïs en plastique du guide suprême doivent bien s'asseoir ou se tenir debout quelque part. Donc, ils ont des endroits préférés, où c'est agréable et confortable, et où il est plus difficile de les filmer ou de les prendre en photo, d'une manière qui ne rende pas trop évident qu'ils son désemparés, misérables et dispersés.
Et parfois, aussi, ils font étalage de leurs flottes de motos et de camions sur les grandes places. Ils attendent, et nous aussi. Personne ne sait comment ce sera à cinq ou six heures de l'après-midi. Personne ne sait combien de gens vont se présenter, ni ce qu'ils vont faire
. Certains disent que ce sera énorme. D'autres que ce ne sera pas si différent des jours précédents. Certains disent que cette fois, les gens viendront avec des armes à feu.
Qui sait? Personne, vraiment.
La clé de la réussite de ce mouvement, c'est son caractère organique, sa capacité à faire corps avec le tissu social. La clé c'est que les gens ne se considèrent pas entre eux comme étrangers les uns aux autres. C'est cette clé que le régime oppressif a perdue.
Il est peut-être vrai qu'à un moment donné, il n'y a pas si longtemps, ils ont été fabriqués à partir du tissu de leur société, aussi rêche et grossier qu'il ait pu être... Mais maintenant ce n'est plus comme ça.
Ce n'est pas aussi facile qu'on pourrait le penser, de rester en phase avec tout le monde. Souvent, vous luttez pour être différent, et quand vous réussissez, et bien c'est là que vous échouez.
Une fois que vous faites partie d'un tissu différent, qui peut bien être de la soie ou du satin, vous échouez automatiquement. La raison pour laquelle l'histoire se répète, c'est que ses leçons sont difficiles à apprendre.
Vous souvenez-vous comment c'était, il y a quelques semaines seulement, quand le régime disait que "l'agitation" allait se terminer en trois jours ? Vous souvenez-vous des jours où ils disaient "nous éteindrons cet incendie d'ici la fin de la semaine"? C'était évident pour moi, pour beaucoup d'entre nous, que cela ne finirait pas si vite...
Je ne pense pas que les trois prochains jours vont déterminer tout le reste de notre histoire. Il peut bien y avoir des foules énormes, ou aucune, ou entre les deux. Ce sont des données incertaines et imprévisibles. Mais il y a des choses dont je suis sûr. Je suis sûr que vous ne pouvez pas vous habituer à avoir soif, et vous ne pouvez pas vous habituer à avoir faim, et personne ne peut s'habituer à être traité comme un citoyen de seconde classe.
Personne n'a jamais pu et personne ne le pourra jamais. C'est aussi simple que ça.
On est mardi matin. Il fait beau à Téhéran. 12 degrés Celsius à l'extérieur. Pas de vent. La pollution, plutôt moins horrible que d'habitude. Il y a peu de trafic. Nous sommes le 15 novembre et il y a trois ans, jour pour jour, des tireurs d'élite ont commencé à tirer sur les gens depuis les toits.
Il y a trois ans, ils pensaient aussi que ce serait "fini d'ici la fin de la semaine".
Cela ne faisait que commencer.
Nos vies comptent, soyez notre voix.

Jin, Jiyan, Azadi
devise des féministes kurdes

Femme Vie Liberté

Soutien à la révolution iranienne en cours

Zan, Zendegi, Azadi
cri de la révolution iranienne

bottom of page