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Photo du rédacteurSirine Alkonost

Voix d'Iran : Julian Assange, ou la liberté par la culture


Dans ce message, reçu il y a quelques jours de Téhéran, l'auteur revient sur la question de la guerre culturelle, avec le lointain parrainage de Julian Assange... Et vous invite au passage à "vous laisser corrompre".


Il n'est pas facile d'expliquer l'Iran. Mais peu importe à quel point un pays peut être différent d'un autre, les principes sont les mêmes. Le peuple iranien, comme tout peuple, refuse de se laisser humilier, et en plus de cela, il voudrait bien être riche et s'amuser et écouter de la musique, regarder des films et tout ça.

Le cinéma, c'est important oui. C'est un peu comme un sport national en Iran.

Regardez combien de prix internationaux les cinéastes iraniens ont remportés au fil des ans. Il n'y a pratiquement aucun prix que des Iraniens n'aient pas obtenu, à un moment donné.

Cette année, le festival du film iranien sera rempli de films d'une nouvelle génération de cinéastes, dont nous n'avons jamais entendu les noms auparavant. C'est en partie parce que les cinéastes les plus connus, ceux que nous connaissons tous, eh bien, certains d'entre eux sont morts, et certains d'entre eux sont en prison, et certains d'entre eux refuseront de donner leurs films à un festival du film de la République Islamique.

Le régime est à l'œuvre depuis un certain temps, essayant de remplacer les cinéastes d'opposition par de nouveaux cinéastes aussi talentueux, mais qui serviraient la République islamique, plutôt que d'être une nuisance. Ces nouveaux cinéastes collectionneront-ils des prix et remporteront-ils également des compétitions internationales ?

Il y a beaucoup de films et de documentaires que vous pouvez trouver facilement (ou pas si facilement d'ailleurs, pour certains), en ligne, et qui pourraient vous aider à comprendre ce pays étrange. Même les mauvais films aident parfois à comprendre ou à apprendre quelque chose. Mais attention, le travail de sous-titrage est souvent terrible !

De toutes manières ce sera toujours difficile d'obtenir les informations dont vous avez besoin pour comprendre l'Iran. La fabrique de fausses nouvelles dont nous vous parlions dernièrement, et les politiciens qui décrètent des choses qui sont soit incorrectes, soit complètement hors de leur compétence, ou les deux, tout ça, ça va continuer pour toujours. Ou longtemps, du moins.

Bientôt, vous serez confronté à des outils très avancés conçus pour vous arroser de toutes sortes d'informations, comme avec une mitraillette, juste pour vous occuper l'esprit et vous détourner de certaines choses très précises qu'on ne veut pas vous montrer.

Il existe un type spécifique d'information, dont certains pouvoirs feront tout pour éloigner les gens. J'ai appris cela dans une interview que j'ai lue, un entretien avec Julian Assange, que je ne connaissais pas assez bien pour avoir une opinion sur lui quand je suis tombé par hasard sur cet article.


Mais une portion en particulier de son interview m'a fait prendre conscience de quelque chose d'important. Cela m'a fait comprendre que je devais "garder les yeux sur le ballon".
Cela m'a fait comprendre qu'il y aura toujours toutes sortes de supercheries, qui essaieront de m'empêcher de comprendre ce qui se passe, ou ce qui vient de se passer, et je dois être intelligent et ne pas m'attendre à être "nourri à la petite cuillère" : je dois trouver la vérité moi-même.
Autrefois, ce n'était pas si difficile. Tout ce que vous deviez faire, c'était en quelque sorte lire entre les lignes, regarder les nouvelles et lire les journaux, et vous, avec un minimum de bagage culturel et d'esprit critique, vous aviez à peu près tout ce qu'il vous fallait pour faire le tri.
Mais maintenant, c'est différent. Il faut de l'attention et de la persévérance pour aller au fond des choses.
Dans la même interview, si je me souviens bien, Assange nous donnait le conseil, de regarder exactement ce que nos dictateurs ne veulent pas que nous voyions.
Je ne me souviens pas des mots précis, mais d'après ce que j'en ai compris, je dois trouver et regarder ce film qu'ils ne veulent pas que je vois. Je dois trouver et lire ce livre, qu'ils ne veulent pas que je lise.
C'est en faisant ces choses que je trouverai ma liberté. En lisant ce la, je me suis dit que c'était une bonne idée, mais, en tant qu'Iranien, j'avais déjà fait ça toute ma vie de toutes façons, alors j'ai continué.
Mais j'ai commencé à apprécier Julian Assange après avoir lu cette interview.
Mettre des gens en prison, on connaît. Mais il ne faut pas oublier que mettre des films, des livres, des poèmes et même certains mots en prison, ça existe aussi.
Il est difficile de sortir les gens de leurs prisons. Même une fois les portes franchies, ils ont emportent parfois la prison avec eux.
Ce n'est pas si difficile cependant, dans le cas d'un livre, de films ou de mots. La plupart d'entre eux ont tendance à se libérer, d'une manière ou d'une autre. Ils ne demandent que ça. Et une fois libérés, ils sont intacts, prêts à être appréciés exactement comme avant. Pas comme les gens.
Alors ne manquez pas une occasion de participer à libérer quelques mots et images cette saison. Nous pouvons vous suggérer des idées, si vous exprimez des préférences, ou vous pouvez simplement tenter votre chance avec quelque chose au hasard.
Soyez bien assurés que si ces livres et ces films n'étaient pas si forts, et si puissants, le gouvernement islamique ne les sélectionnerait pas, et il n'emprisonnerait pas les gens qui les ont faits.
"Ils corrompent l'esprit" disent-ils. Et bien, laissez vos esprits se corrompre un peu, avec la culture iranienne. vous êtes, après tout, un peu Iranien maintenant, depuis le temps que vous nous lisez, et si je me souviens bien, nous vous avons même faits citoyens d'honneur.
Venez vous corrompre à la source de notre culture, je vous garantis que vous n'aurez aucun regrets (à part peut-être celui de ne pas vous y être mis plus tôt)

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