Ce témoignage reçu de Téhéran explique la tradition de Chahar-Shanbeh-soori, qui donne lieu cet année à un appel à manifester trois nuits de suite à travers le pays.
Aujourd'hui, c'est Chahar-Shanbeh-Soori, qui peut se traduire par "la célébration du mercredi". Malgré son nom, la célébration du mercredi a lieu le dernier mardi avant Nowrooz, qui est la fête du nouvel an persan.
La fête d'aujourd'hui est une fête très ancienne, qui s'articule autour de deux idées principales.
Premièrement, les Perses zoroastriens des temps anciens avaient l'habitude d'allumer des feux sur leurs toits ce jour-là, parce qu'ils croyaient que leurs ancêtres décédés leur rendraient visite de l'autre monde à la nuit tombée, et que les feux les aideraient à retrouver leur destination (ce qui n'est pas sans alimenter d'alléchantes théories de niche impliquant des visiteurs extra-terrestres).
Deuxièmement, comme ils croyaient attendre des invités spéciaux, ils essayaient de nettoyer leurs maisons du mieux possible et d'enlever toute trace de vieux désordre, et cela incluait la pratique de jeter et de casser de vieilles poteries, comme des cruches usées et fêlées ou des assiettes et plateaux ébréchés. Ce sont ces pratiques qui se sont transformées en "khooneh tekâni" ou "remuage de maison" (le fameux nettoyage de printemps), qui est complété par des sauts au-dessus de feux de joie ainsi que des pétards et feux d'artifices.
Beaucoup d'autres choses ont été ajoutées plus tard, et cela varie même d'une région à une autre.
Mais parce qu'il y a du feu, et qu'il y a des pétards qui éclatent, et parce que c'est une "célébration" et parce qu'il s'agit de traditions pré-islamiques, et parce que les gens sautent et dansent et que les garçons et les filles se réunissent et parce qu'il y a de la nourriture, de la musique et de la joie, la République Islamique déteste ça.
Ils ont toujours détesté ce mercredi des flammes, depuis 44 ans, et maintenant, c'est même devenu un sujet très sensible, car pareille célébration, dans le contexte actuel, contient inévitablement des éléments révolutionnaires.
Il y eu des "invitations" sur les réseaux sociaux, et même sans que ces invitations ne leur soient forcément parvenues, de nombreuses personnes sont à nouveau descendues dans les rues, en scandant des slogans et en allumant des feux, en vue des célébrations d'aujourd'hui, et par chacun de ces petits gestes, elles montrent à la République Islamique que la Révolution persiste et se propage.
Le défi vidéo de danse des jeunes filles d'Ekbatan est devenu viral. Le régime a beau avoir retourné tout le quartier pour les retrouver, leur avoir fait enfiler des masques et des Sweat-shirt trop larges, pour venir faire leurs excuses, les vidéos de soutien se multiplient.
En temps normal, ces quelques semaines avant Nowrooz sont consacrées au rangement, au shopping et à l'organisation de festivités impliquant de grandes quantités de nourriture. Pensez marchés de Noël et courses de réveillon, et les visites familiales à travers le pays pour présenter ses respects aux plus anciens et au milieu de tout ça, qui serait déjà un casse-tête suffisant pour la République Islamique qui ne parvient même plus à fournir à ses habitants de quoi oublier ses soucis dans le shopping, il y a ces filles qui dansent, les cheveux lâchés et le nombril à l'air, et le pays entier qui les imite, jusqu'aux petites Baloutches en costume traditionnels, dans des vidéos floutées ou décapitées qui sont autant de pieds de nez bravaches à un pouvoir qui multiplie les tentatives infructueuses de faire taire la révolution sous toutes ses formes.
Heureusement pour le Régime, il y a toujours de l'espoir à trouver pour lui auprès des puissances occidentales, dont rien ne semble apaiser l'appétit pour la moindre forme "d'accord".
Et quand je dis "accord", cela implique le paiement de grosses sommes d'argent, qui finiront toujours au Liban, en Irak et en Syrie, quand ce n'est pas directement sur les comptes offshore de nos "dirigeants", le tout en échange de prisonniers/otages qui ont la chance d'avoir un passeport étranger de secours, comme un passeport britannique ou allemand ou américain.
Posséder une "citoyenneté alternative" est précieux, lorsqu'il s'agit d'avoir un pays puissant qui se démène pour vous secourir / libérer/ rapatrier, mais en Iran, cela fait avant tout de vous une cible.
Les nombreuses années d'expérience de la République Islamique dans ses rapports avec les puissances occidentales l'ont amenée à littéralement considérer ces «citoyens binationaux» comme des proies toutes désignées, des moyens de pression ou plus simplement des sources de revenus.
La situation économique est mauvaise, c'est sûr. Ils ont réussi à conclure un accord avec les Saoudiens maintenant, ce qui signifie qu'ils pourraient avoir stabilisé l'inflation à environ 70 % pour le moment. Oui, 70%, c'est considéré comme une victoire. Sans ça on allait plus vers 300 ou 400.
Or donc, nous envisageons très calmement un taux d'inflation de 70 % pour l'année à venir.
Et il y a une grave pénurie d'eau. Et y a beaucoup de nos braves hommes et femmes, qui sont comme des morceaux de notre propre corps, dans les prisons de la République islamique, où il n'y a pas de limites aux méthodes qu'ils utilisent, pour transformer les humains en cadavres glacés ou en réceptacles à peine vivants d'âmes à jamais brisées.
Prenons un court instant ce soir, alors que nous nous tiendrons près de nos feux, pour nous demander qui sont les morts qui nous rendraient visite de l'autre monde cette année ?
De nombreux enfants seraient parmi eux. Des dizaines d'enfants et des centaines de jeunes hommes et femmes ont été tués en quelques mois seulement. Ne les oublions pas ce soir.
Et n'oublions pas, que les anciens Zoroastriens n'étaient pas des adorateurs du feu. Ils adoraient la "Sagesse", qui était représentée par le feu. La vérité ne peut être vue qu'à la lumière de la sagesse. C'est l'idée centrale de la religion zoroastrienne. La Sagesse - la chose même que nous semblons avoir perdue en chemin.
Les zoroastriens ont pour tradition d'entretenir le feu dans leurs temples. Certains de ces feux ont été entretenus pendant des milliers d'années.
Le feu de notre révolution sera lui aussi entretenu, avec le même zèle et la même persévérance, car cette révolution est aussi celle de la conscience et de la sagesse, contre les ténèbres où prospèrent les voleurs et les criminels.
Nous vous souhaitons un joyeux Chahar-Shanbeh-soori et une bonne année à venir, et nous espérons endurer et persévérer, jusqu'à ce que la justice se lève comme un jour nouveau, sur la vérité visible par tous.
Nous envoyons nos salutations à toutes les personnes qui croient en la sagesse, et à tous les citoyens d'honneur qui se tiennent à nos côtés dans ce combat.
Nos vies comptent, soyez notre voix.
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