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Photo du rédacteurSirine Alkonost

Voix d'Iran - Les « signes de Dieu »


Un nouveau témoignage de Téhéran, reçu ce matin même, en réaction aux manifestations d'étudiants et au discours du « Guide Suprême ».

Signes de Dieu
Hier soir, je me suis couché vers 21h00.
C'est très tôt, même selon mes propres standards, mais je pouvais à peine garder les yeux ouverts. Et comme d'habitude, les gens se sont mis à crier depuis leurs fenêtres, à 9 heures précises. "Mort au dictateur" et autres slogans du même genre.
Cela m'a endormi comme une berceuse, une berceuse que me chantait mon quartier. Je ne sais pas depuis combien de nuits cela dure. Peut-être 14.
Le dictateur lui-même est venu parler hier, après une longue absence. C'est sa stratégie de base, attendre longtemps, jusqu'à ce que tout soit sous contrôle, puis revenir glorieux et triomphant. Sauf que cette fois, tout n'est pas sous contrôle, et rien ne se passe comme il le voudrait.
Comme d'habitude, l'idée générale de son discours est que toute cette agitation est le travail de l'ennemi. Les États-Unis, Israël, les pays d'Europe occidentale, la Grande-Bretagne, les suspects habituels : "c'est l'œuvre de l'ennemi". Et, les manifestants, eux, ne sont "qu'une petite partie de la population" .
Bien sûr, les plus jeunes auront été influencés et excités par les vilains médias occidentaux.
Ceux-là comprendront après une petite "punition". Mais il y a ceux qui ne sont pas de jeunes gens naïfs et excitables (Dieu sait comment ces pauvres âmes se sont perdues alors qu'elles avaient tant de conseils à leur disposition! ). Ceux-là doivent être traités comme des gens qui savent ce qu'ils font.
Fort bien! Au moins ça veut dire que quelqu'un sait ce qu'il fait par ici...
Le jour-même de ce discours, une organisation de l'université Sharif a demandé à toutes les universités d'Iran de se mettre en grève, enseignants et étudiants ensemble. Et le second degré, dans les lycées, va aussi se mettre en grève.
Nous avions vu, déjà, ces derniers jours, des vidéos de jeunes filles de 15 ou 16 ans arrachant les images des ayatollahs de leurs livres et des murs de leur classe.
Saviez-vous que "Ayatollah" signifie littéralement "signe de Dieu"?.
Bien sûr, c'est un rang, au sein du clergé, comme cardinal ou évêque. Mais en termes de théologie, comment accède-t-on au statut de devenir un signe de Dieu ? Je ne sais pas combien nous en avons aujourd'hui. Peut-être 300 ? 400 ?
Donc, concrètement, nous avons tout un tas de signes de Dieu, dirigés par un suprême signe de Dieu, qui clament que des centaines d'étudiants qui sont déjà capables de gagner des Olympiades de mathématiques et des concours de construction de robots dans des communautés internationales, sont... naïfs ? Sérieusement ?
Pensez-y. Si le pouvoir en place refuse de reconnaître une nation entière, où va-t-on ?
Aujourd'hui, nous attendons de voir combien d'universités et d'étudiants répondront à l'appel de l'université Sharif. Sûrement pas tous. Mais nous verrons bien. La plupart d'entre nous comprennent vraiment à quel point il est difficile d'entrer dans ces écoles. Des vies entières et des avenirs sont en jeu ici. Nous ne jugeons pas ceux qui craignent les conséquences.
Cela aussi a toujours été une stratégie fournie par le guide suprême. Il a toujours confronté les protestations et les défis à l'escalade. Il a toujours exigé que les différends soient résolus dans le sang et les larmes.
À ceux qui se demandent encore s'il s'agit vraiment d'une révolution, considérez ceci comme votre "signe de Dieu" !
Nos vies comptent, soyez notre voix.

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