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  • Photo du rédacteurSirine Alkonost

Voix d'Iran : On peut toujours tuer les vivants, jamais ramener les morts.

Ce témoignage reçu de Téhéran il y a quelques jours revient sur l'actualité des protestations en Iran, la dynamique créée (ou non) par les exécutions, et la réaction du Régime aux caricatures publiées par Charlie Hebdo.

Réponse symétrique


Il y a encore eu des manifestations.
Divers appels, à différents endroits.
C'était plus ou moins sporadique, et la plupart des manifestants, à Téhéran en tous cas, ont choisi de manifester la nuit, quand il faisait noir.

Le régime a encore exécuté deux autres manifestants. Ils l'ont fait à la hâte, comme s'ils estimaient qu'il était nécessaire de procéder à ces exécutions avant de perdre l'occasion.

Cela me rappelle toutes les exécutions qui ont eu lieu après la révolution de 1979. Beaucoup ont été organisées à la hâte aussi. Ceux qui procédaient à ces exécutions craignaient qu'un ordre n'arrive d'en haut pour les empêcher.

L'un des cas célèbres a été la mort d'Amir Abbas Hoveyda, ancien premier ministre, qui a été mis à la prison d'Evin par le régime du Shah, dans l'espoir de calmer la révolution.

Hoveyda s'est senti trahi et a refusé de quitter la prison lorsqu'on lui a proposé une issue.
Plus tard, il a été assassiné dans l'enceinte où il était jugé, avant la fin du procès. À ce jour, on ne sait pas qui l'a tué.

Mais pourquoi? Pourquoi ces gens sont-ils si pressés et veulent-ils tuer leurs victimes avant que quiconque puisse les sauver ? c'est une question importante.

Croient-ils que ces exécutions assureront leur sécurité ? Qu'est-ce qui cause l'urgence?

En 1987 ou 1986 je pense, lorsque l'ayatollah Montazeri était encore l'héritier choisi par Khomeyni pour être le prochain guide, ils ont procédé à des exécutions par centaines, chaque jour. Certains procès ne duraient que 5 minutes. Montazeri avait protesté et dit à Khomeyni : « Qu'est-ce qui est si pressé ? On peut toujours tuer les vivants. Nous ne pouvons pas ramener les morts".

Montazeri fut ensuite empêtré dans un scandale puis placé en résidence surveillée.
Khomeiny se retrouvait sans héritier choisi. Le dictateur actuel a été choisi seulement après sa mort.

L'urgence implique qu'une exécution, ou ses effets, sont nécessaires avant un certain moment, sinon ils pourraient être inutiles ou contre-productifs, en termes de résultats souhaités par les responsables.

L'urgence de ces exécutions nous montre que le système judiciaire se préoccupe des questions de sécurité, et non de justice.

C'est la seule conclusion solide que je puisse tirer. En d'autres termes, ils ont tué deux jeunes hommes, uniquement pour leur propre sécurité, sans rien d'autre en tête. Comment appelle-t-on une personne qui fait ça ?

Et ils en ont encore plein d'autres à pendre, hein. Et il en arrive sans cesse de nouveaux.
Des jeunes hommes et femmes qui se battent pour la démocratie, la liberté et l'égalité et pour les droits des femmes, et pour tous les "pour" que vous connaissez déjà, sont tués ou arrêtés, "sur place ou à emporter", en somme.

Et en retour, la République islamique reçoit une tape sur les doigts, et certains disent "C'est pas bien !" ou "c'est pas bien du tout!" certes! Merci ! Nous savons que "c'est pas bien".

Il y a ceux qui disent que ces exécutions alimenteront le feu de la révolution. Il y a aussi ceux qui pensent que ces exécutions aident à éteindre ce feu.

Je vous dirais, en tant que participant individuel, que nous ne nous sommes pas engagés dans ce combat à cause des exécutions, et ce n'est pas à cause d'elles que nous protestons.

Nous protestons, car il nous est pratiquement impossible de vivre ainsi. Cette vie est une vie de peur et de douleur, sans aucune justice et sans avenir prévisible, après des années et des années d'insultes et d'humiliations.

La protestation ne s'arrêtera pas, parce qu'elle ne peut pas s'arrêter. Et les exécutions ne sont plus pertinentes maintenant. Et c'est encore plus douloureux et insultant de voir que des jeunes doivent être pendus, pour des effets complètement hors de propos.

S'ils sont destinés à induire la peur, la vérité est que nous vivons dans la peur depuis plus de 40 ans.

S'ils sont destinés à provoquer la colère, ce sont des gouttes dans la mer de notre colère.

S'ils sont censés faire quoi que ce soit, je ne vois tout simplement pas quoi que ce soit se produire.

À ce stade, le vrai visage de la République islamique a été révélé au monde entier. À ce stade, nous savons ce que cela signifie quand quelqu'un essaie de la défendre. Elle est indéfendable. Les faits sont indéniables, ceux qui s'y essaient, nous savons tous que c'est parce qu'ils ont à quelque chose à y gagner personnellement.

Il convient également de mentionner qu'en réponse aux caricatures de Charlie Hebdo sur le guide suprême, certains responsables de la république islamique ont demandé une "action symétrique" .

Eh bien, bon courage !

Déjà, ils ont toujours répondu aux stylos avec des fusils.

Ils ont toujours répondu aux films, aux dessins animés, aux pièces de théâtre et aux peintures avec des fusils, des couteaux et des bombes.

C'est parce qu'ils ne savent pas vraiment écrire, faire des films ou peindre, chanter n'en parlons même pas. Ce n'est pas leur truc.
S'ils réussissaient à répondre à une caricature par une autre, ce serait tout un exploit.

Ensuite, la France n'a pas de guide suprême. Donc, ils ne peuvent pas le caricaturer. Et bonne chance pour essayer de dessiner ce qui est sacré pour le peuple français.

Peut-être qu'ils peuvent essayer du fromage, ou du vin, ou je ne sais pas, Balzac, ou Victor Hugo, Voltaire, Rousseau, ou des baguettes.

Bref, j'aimerais bien voir un partisan de la république islamique essayer de gagner des points, en utilisant un stylo ou un pinceau.

Inutile de dire que le stylo devrait être utilisé comme un stylo. (Ils ont tendance à oublier à quoi sert un stylo)












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Zan, Zendegi, Azadi
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