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Voix d'Iran: relire Faust à Téhéran

Photo du rédacteur: Sirine AlkonostSirine Alkonost
Un nouveau témoignage sur l'utilisation d'internet comme outil de propagande du régime, un sujet déjà abordé dans le billet du 23/12, "la vérité ou la vitrine".


On pourrait penser qu'il est aisé de simplement dire ce que l'on pense. Mais cela n'a jamais été facile. Dire ce que l'on pense a toujours été difficile. Même penser, sans dire à personne ce à quoi on pense, est difficile.

Dans toutes les dictatures du monde, il est assez courant que personne ne soit autorisé à dire ce qu'il a en tête.
Normalement, les dictateurs préfèrent même ne pas vous laisser dire qu'ils ne vous laissent rien dire.

Mais ce n'est pas le pire. Vous pouvez même être obligé de dire des choses que vous ne pensez pas être vraies. Vous pouvez être obligé de penser à des choses auxquelles vous ne voulez pas penser.

Vous pouvez par exemple être un journaliste, et travailler dans un journal où un rédacteur en chef ou une personne effrayante vous dit quoi écrire, puis vous ordonne de le signer. Vous devez alors mettre votre nom sous les mots de quelqu'un d'autre.

Des choses de ce genre se produisent, uniquement lorsque les noms des personnes sous les mots qu'elles ont écrits ne fournissent pas les résultats qu'ils souhaitent. Il faut d'autres noms.

Il en va de même pour les films, les documentaires, les vidéos YouTube, tout ça. C'est une réalité que nous vivons aujourd'hui. L'Internet est inondé tous les jours, par divers contenus qui prétendent provenir de personnes.

Ils montrent un Iran très coloré, agréable et beau, avec des gens très heureux. Des centres commerciaux bien approvisionnés, des hommes et femmes séduisants vêtus de vêtements à la mode et des restaurants qui ressemblent à Beverly Hills. La République islamique devient très douée pour fabriquer ces vitrines à usage interne et externe.

Dans un monde où l'accès à ses propres pensées et paroles est limité, et où il est difficile de joindre les deux bouts, les candidats jeunes et sans méfiance se voient offrir de bons budgets, ainsi que de l'équipement et de la liberté, uniquement s'ils acceptent de faire une chose : mettre leurs noms et leurs visages sous les contenus et les discours de quelqu'un d'autre.

Tout ce qu'ils ont à faire est de laisser ces monstres effrayants utiliser leurs visages innocents, jusqu'à ce qu'eux aussi commencent à ressembler à d'horribles monstres.

Bien sûr, les choses que vous voyez dans les vidéos existent. Ces immeubles, ces centres commerciaux et ces restaurants existent. Et même ceux qui s'y promènent existent aussi.

Mais les pensées, les mots et les émotions qui vous sont présentés dans ces vidéos vitrines, ces images et ces messages ne sont pas réels.

Ne vous laissez pas berner par une fille qui n'a pas l'air trop malheureuse et qui semble avoir le genre de liberté qui contredit tout le sang qui a été versé lors de toutes les manifestations et protestations.

La liberté, peut aussi être payée ou achetée, dans une certaine mesure. Il y a ces stations et centres sportifs coûteux, avec des courts de tennis où il y a même un parcours Gold, caché quelque part dans les parties nord de la capitale.

Des frais d'inscription et d'entrée d'un montant considérable sont payés, par ceux qui en ont les moyens, et les personnes admises peuvent alors prétendre qu'elles ne sont pas en Iran pendant un certain temps et se sentir bien dans leur peau.

C'est dans ces mêmes endroits que vous pourrez rencontrer ceux qui ont vendu leurs jolis visages, pour une somme d'argent et un nouvel appareil photo, et un titre, comme "Cinéaste" ou "Journaliste".

Ils sont là pour filmer les gens qui ont payé pour être libres. Ils sont là pour faire des clips vidéo de cette foire aux vanités.

L'habit ne fait pas le moine. Ne jugez pas une ville non plus, par ses YouTubers. Si vous voulez juger ma ville, essayez de savoir ce qui est arrivé à cet Espagnol, qui essayait juste de marcher jusqu'au Qatar, pour regarder du football. À quel point un Espagnol peut-il être malchanceux ? Facile, il pourrait finir par être coincé dans une prison iranienne.

Et il y a plusieurs Français, et Suédois, et Belges, qui sont tombés dans la toile d'araignée.
Peut-être qu'ils ont cru ce qu'ils ont vu sur Youtube. Peut-être qu'ils pensaient que ce pays était en fait un endroit intéressant, avec beaucoup de gens sympas, et qu'ils pensaient que tout ce qu'on racontait sur le gouvernement n'était que de la connerie, parce que tout avait l'air parfait, sur toutes les photos et vidéos qu'ils ont vues.

Vous pouvez faire à peu près n'importe quoi ici en Iran, tant que vous êtes prêt à leur donner votre âme ou votre argent.

Le billet d'aujourd'hui était sponsorisé par Faust.

Ne vous laissez pas embobiner.


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